Phil52 va encore parler de "drouille Citroën" et ceux qui me connaissent savent que je rêve de cette auto depuis longtemps.
Pourtant, contrairement à la 1100, à la bx et à la DS, rien dans mon passé ne me rapproche d'elle. Pas de souvenir, pas d'expérience. Comme la GS ou bien la cx, pas de lien intime, j'ai découvert la gs via le monde de la bx et aussitôt adoptée, la cx, je suis tombé dessus en cherchant, sans trouver, une DS.... mais pareil j'ai adoré. Et j'adore encore.
Mais pourquoi la SM? Lorsque j'ai commencé à collectionner les drouilles au double chevrons, j'ai rapidement fait sa connaissance, d'abord physiquement, superbement profilée, une ligne a tomber par terre. J'ai vite fait de me dire que ce n'était pas une auto pour moi vu la réputation qu'elle traine encore aujourd'hui (et qui tend a disparaitre heureusement) et puis quitte a casser la tirelire, je voulais le faire sur une DS, par dessus tout mon rêve de gamin.
Ca n'est pas allé plus loin à l'époque. Arrive ce jour de 2009, je n'ai pas encore ma DS, et je passe à Limoges chez un ami à moi, collectionneur (il possède plusieurs DS des Maserati 424, une Ferrari mondial et tout un tas d'autres autos) qui possède une SM injection de 1972, beige tholonet. C'est quelqu'un de très abordable, on discute voitures bien évidemment, de DS, de SM. Il me dit tout de go, essaie là.
Un peu la trouille tout de même, conduire les autos des autres n'est pas dans mes habitudes. Peur de l'abimer, de tomber en panne aussi. Il me donne les clefs, ne monte même pas avec moi. Son seul conseil: "attends que le moteur soit à température, après seulement, pied droit à la tôle"
Je démarre la bestiole, le son est bien plus envoutant que le pauvre 4 cylindre de ma cx directement hérité de la DS, on a de suite qu'une envie c'est appuyer. Je roule peu sur les boulevards de Limoges. Heureusement le moteur arrive vite à température. Là j'appuie, impossible de résister, les 180 ch sont là et poussent fort, très fort, l'auto semble légère comme une plume, ne dévie pas de sa trajectoire, ne vibre pas, se place au mm avec la DIRAVI, à laquelle il faut le dire je suis très bien habitué avec la CX, le tout dans le confort ouaté d'une DS.
Cette expérience unique m'amène à 140 km/h en pointe sur le boulevard.... il faut se calmer. Il faut également se rendre à l'évidence, je suis complètement emballé. Citroën et Maserati ont fait une belle GT. Je sors la sempiternelle phrase du collectionneur en herbe "il m'en faut une"... à partir de là tout est dit et la machine est enclenchée au fond de ma caboche... elle ne s'arrêtera plus jusqu'au jour fatidique de
mon divorce... euh pardon de l'achat.
Bien sur le temps passe, j'ai de multiple fois l'occasion de rouler dans cette voiture, mon ami ne rechignant pas à prêter. Puis il faut avancer ma DS, continuer à faire rouler les autres.
Les enfants arrivent, le BTP prends du temps. Je regarde les annonces, mais je sais que ce n'est pas le moment d'acheter, pas les sous, pas le temps, place difficile à trouver. Malgré tout je suis les diverses restaurations sur le net, je me documente, je lis beaucoup, ausculte celles que je croise en vrai, je discute avec des passionnés, bref j'apprends.
Comme beaucoup de gens, je crois au début a des mythes comme celui-ci: Le moteur de la SM serait celui de la Maserati Indy amputé de deux cylindres: c'est faux.
La vérité est assez bien résumée sur le site Wikipédia:
"L'absence d'un moteur spécifique chez Citroën, puis le rachat de la firme italienne Maserati en 1968 permet à Citroën de doter la SM d'un moteur Maserati V6 étudié spécifiquement. Un moteur V8 de Maserati Indy est, dans un temps record, amputé de deux cylindres pour impressionner les cadres de Citroën sur la réactivité de Maserati. Selon Marc Sonnery auteur du livre Maserati, the Citroen Years (eauxrouges publishing) ce moteur V8 - 2 prototype est toujours stocké à Modene. Pour le V6 de série, les ingénieurs partiront d'une feuille blanche. On note en effet que sur le V6 de la SM, les chaines de distribution sont au milieu du bloc alors que sur les V8 elles sont en fin de bloc."
Autre mythe, la crise pétrolière aurait provoqué la fin de la SM. Archi faux encore une fois, une SM injection est une des plus économique de sa catégorie. Ce qui a provoqué la fin de la SM, c'est l'inaptitude du réseau citroen à l'entretenir, les mécanos n'étaient pas assez bien formés et les clients très exigeants n'étaient pas les mêmes que ceux qui roulent en GS, 2cv, cx ou dsuper; mais plutôt des gens aisés habitués a rouler en Porsche ou Ferrari. Le coup d'entretien était en outre prohibitif et le moteur moins fiable que ceux des concurrentes directes.
Pour en finir sur le moteur:
"Les bris de chaines de distribution (le moteur en possède 3 , dont la primaire soumise à rude épreuve, car entraînant un arbre intermédiaire emmenant non seulement les 2 chaînes secondaires, mais aussi la pompe hydraulique+ l'alternateur+ le compresseur de la climatisation ), ruptures de soupapes (creuses remplies de sodium pour un meilleur refroidissement), claquage de joints de culasse à cause d'une défaut de conception des chemises qui s'enfonçaient dans le bloc et un dimensionnement trop juste du refroidissement, ainsi que des coulages de bielles , à la suite d'une mauvaise conception de la pompe à huile et du carter moteur..., n'ont pas encouragé les ventes, d'autant que ces défauts n'ont jamais été réellement corrigés..."
Si on fait le point aujourd'hui:
- bris des chaines: il faut les tendre régulièrement ==> tous les 10 000 km et les tendeurs ont évolué en cours de production pour supprimer ce défaut de casse
- soupapes: aujourd'hui on monte des soupapes pleines... il faut changer les 6 soupapes d'échappement
- pompe à huile et carter moteur: surtout vrai sur les deux premières années de production. En suite c'est modifié.
- joint de culasse corrigé en cours de production aussi.
- chaine primaire: moins sollicitée par montage de silentbloc d'arbre de nouvelle génération et de compresseurs modernes en remplacement des compresseurs York verticaux des débuts donnant énormément d'accoups à l'enclenchement.
Les SM chauffent toujours beaucoup et n'aiment pas les embouteillages, elles n'ont de toutes façons pas été conçues pour ça.... l'environnement moteur est peu ventilé et il n'y a pas beaucoup de place.
Autre défaut, le pignon des vitres électriques qui casse, il est en plastique, il faut le remplacer par un modèle en bronze.
Finalement lorsque l'on sait tout ça, on commence à savoir pas mal de choses. Et pour continuer l'histoire; En regardant les prix, j'ai vu ceux ci augmenter d'un seul coup l'année dernière, et ce de manière astronomique, je voyais peu à peu mon rêve s'envoler. Un ami qui en a acheté une en 2015, l'avait acheté au bon moment. Après c'est devenu rare d'ne trouver sous les 20 000 euros avec le moteur tournant, roulante et complète....
En discutant et en lui faisant part de mes impressions du marché actuel, il me dit, j'ai peut-être ce qu'il te faut. Je cherchais à la base un modèle à carbu, bien plus abordable en entretien (tout est relatif) et au caractère moteur plus agréable pour moi. Je voulais la clim, pas de cuir et une couleur pas trop à chier.
Voici ce qu'il m'a trouvé:
Un modèle carburateur de 1972 (d'après la teinte vert argenté qu'elle arbore.... qui est pas loin d'être ma couleur préférée du nuancier)
A la base intérieur tissus, mais trop abimé pour être conservé, il fournit un cuir marron à la place.... on verra si on garde ou pas.
Clim et vitres teintées.
Elle est aujourd'hui la propriété d'un ancien agent Citroën à la retraite qui restaurai des SM et des DS en son temps. Il l'a récupérée il y'a longtemps suite au décés d'un autre agent citroen à qui elle appartenait et qui avait refait le moteur de fond en comble il y'a 25 ans, juste avant son décès.
Depuis elle est au fond d'un hangar et ne bouge pas. Ce serait donc une bonne base puisque le plus critique est fait. Resterai a reprendre tout le reste, ce qui représente beaucoup de travail. Je vais la voir au mois d'aout et décider si je prends ou pas. Elle est équipée d'une ligne inox. Ca vaut aujourd'hui 1400 euros, rien que ça.
Comme elle n'est pas trop chère, ça peut-être une bonne affaire.